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Un Prix Nobel de médecine choisit l'euthanasie

Christian de Duve lors d'une conférence intitulée «Qu'est-ce que la vie?», le 27 janvier 2006 à Namur. BRUNO ARNOLD/AFP

Christian de Duve a décidé du jour et des circonstances de sa mort, entouré de ses proches. La Belgique est l'un des rares pays à autoriser, sous certaines conditions, cette procédure.

Christian de Duve, médecin et chimiste belge, Prix Nobel de médecine en 1974, est décédé samedi par euthanasie à l'âge de 95 ans. Il s'agit de la deuxième personnalité très connue, après le grand écrivain belge d'expression néerlandaise Hugo Claus en 2008, à choisir de mourir par euthanasie alors que la Belgique fait partie depuis 2002 des rares pays au monde à avoir légalisé cette pratique sous certaines conditions.

«Il nous a quittés dans une grande sérénité, refusant la prise de calmants précédant l'injection décisive. Il est parti en nous disant adieu et en nous souriant», a raconté au quotidien Le Soir sa fille Françoise. Christian de Duve avait soigneusement programmé sa fin, voulant par exemple attendre que son fils vivant aux États-Unis puisse rentrer en Belgique, début mai, pour s'en aller entouré des siens. Il a mis à profit ce mois précédant sa mort pour écrire à ses amis et anciens collègues pour leur faire ses adieux, selon Le Soir, qui a publié lundi l'interview posthume du scientifique. Dans son dernier ouvrage, des mémoires intitulées Sept vies en une (Éd. Odile Jacob), Christian de Duve, évoquant «la dernière ligne droite», concluait par ces mots: «J'essaie de terminer ce parcours avec la sérénité qu'il faut et avec le sentiment de ne pas avoir failli à ma promesse de scout, tout en déplorant de ne pas avoir fait mieux. Qu'il en soit ainsi.»

«Quand je disparaîtrai, il ne restera rien»

Né en Angleterre en 1917 dans une famille de la noblesse catholique francophone d'Anvers, élevé chez les jésuites, ce grand scientifique, tout en reconnaissant les bienfaits des religions, estimait que «pour remplir correctement leur fonction, (elles) devraient s'affranchir du carcan doctrinal et de l'autoritarisme qui étouffent leur liberté d'action». Favorable à la limitation des naissances pour lutter contre la surpopulation, il estime presque «criminelle» la position du Vatican qui y est opposé. Et le décrit comme un «petit cénacle autoperpétué de vieillards célibataires et misogynes, souvent d'une intelligence brillante, mais engoncés dans leur pourpre, leurs rites, leurs certitudes et leur prétention de légitimité».

Il avait obtenu le prix Nobel de médecine, avec le Belge Albert Claude et l'Américain George Palade, «pour leurs découvertes concernant l'organisation structurale et fonctionnelle de la cellule». Il a raconté dans son autobiographie que le jour où on l'a appelé pour lui annoncer la nouvelle, «ce fut une authentique surprise, non pas parce que je ne m'y attendais pas, mais parce que je ne m'y attendais plus». Les travaux récompensés, que l'on savait «nobélisables», avaient en effet été publiés onze ans auparavant. Christian de Duve était de ceux qui, tout en reconnaissant la valeur du prix Nobel, déploraient que, selon le testament d'Alfred Nobel, seuls trois chercheurs maximum puissent être récompensés. «Tout le monde connaît des exemples où le nombre de candidats pour une découverte donnée dépassait le chiffre fatidique et où une sélection a dû être faite», a-t-il écrit, allant même jusqu'à poser la question: «Faut-il supprimer le prix Nobel?»

«La mort, ce serait beaucoup dire qu'elle ne m'effraye pas, mais je n'ai pas peur de l'après, car je ne crois pas. Lorsque je disparaîtrai, je disparaîtrai, il ne restera rien», avait-il dit. Il restera pourtant le souvenir d'un esprit brillant et iconoclaste.

Un Prix Nobel de médecine choisit l'euthanasie

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62 commentaires
  • fanfantonia

    le

    l'euthanasie est un permis de tuer!!! aucune barrière de sécurité ne pourra éviter les dérives. Ce jour là, la confiance absolument indispensable entre soignant/soigné sera définitivement perdue. Or il y a beaucoup plus de malades en France que de gens souffrant au point de vouloir être euthanasiés! Va t on continuer à sacrifier le peuple pour des minorités liberticides? Ce que sont ceux qui lobbyisent pour obtenir l'euthanasie , soit un droit de mort de certains sur d'autres, légalisé, en France. Ceux qui citent la Belgique devraient investiguer un peu plus pour connaitre la réalité de ce qui s'y vit sur ce plan. Id pour la Hollande...
    Il faut cesser de nier le réel!

  • THUCYD

    le

    pourtant quelle analogie avec la coutume japonaise...

  • REG135

    le

    Ce n'est pas parce qu'on veut mourir qu'on veut forcer l'autre à mourir, item dans le sens inverse. Car nul n'a demandé de naître, on ne sais pas pourquoi on est en vie, nous sommes inégaux de naissance et on sais qu'on va partir un jour. Le but c'est de ne pas souffrir, si certaines personnes pensent que partir leur évite de souffrir, malgré les solutions alternatives qu'on accepte leurs requêtes de délivrance (requêtes toujours révocable même au dernier moment), on sera toujours en vie et personne ne nous en empêchera. La souffrance peut être physique, psychique, la perte d'autonomie, etc. et pour certains c'est insupportable et impossible à résoudre selon leur volonté, on ne peut pas nier. Par contre on peut essayer de convaincre quelqu'un de vivre et on doit vérifier sa lucidité et l'absence de pression, les directives anticipés sont un sérieux appui. Forcer la vie font que par désespoir, il y ait des aides à mourir clandestines ou des suicides systèmes D avec entrave à la justice par compassion mettant en péril la sécurité de la vie en l'absence d'une loi sécurisé mais autorisant l'ultime liberté aidé dans la Dignité. Les médecins auront toujours le droit comme pour l'IVG, de refuser de pratiquer l'euthanasie mais n'empêchera pas d'autres de le faire. L'image de certains médecins est entaché comme un urgentiste qui en a fait les frais de cette minorité extrémiste conservatrice et virulente (voir faits diverses homophobes). Vive la démocratie et la liberté.

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