L'immigration illégale représenterait 1 % de la population européenne
De 4 à 5 millions d'immigrés clandestins résident en Europe, selon la première enquête exhaustive depuis 2008, réalisée par le think-tank Pew Research. L'Allemagne et le Royaume-Uni sont, de loin, les principaux pays d'accueil, devant l'Italie et la France. Dans cette dernière, le nombre de résidents illégaux n'aurait pas progressé depuis vingt ans en raison des régularisations.
Par Yves Bourdillon
C'est l'un des dossiers politiques les plus sensibles du moment en Europe ; l'immigration illégale, qui contribue aux bons scores électoraux des partis nationalistes et suscite des tensions entre membres de l'Union, est soupçonnée de peser sur les comptes sociaux et de réduire le le travail des autochtones. Mais quelle est l'ampleur du phénomène ? Environ 1% de la population européenne, c'est à dire de 3,9 à 4,8 millions de personnes en 2017, répond le think tank Pew Research, dans un rapport diffusé mercredi.
En raison de leur taille mais aussi de leur politique d'accueil plus accommodante que d'autres, quatre pays (Allemagne, Royaume-Uni, Italie et France) concentrent 70 % des migrants illégaux, selon l'étude de cet institut américain. La moitié des illégaux réside même dans deux pays seulement, l'Allemagne (1 à 1,2 million) et le Royaume-Uni (800.000 à 1,2 million). Ce dernier se singularise par le fait que les illégaux y sont presque aussi nombreux que les immigrés légaux et représentent 1,5 % de la population, le plus fort taux d'Europe. L'Italie hébergeait en 2017 près de 600.000 illégaux, et la France entre 300 et 400.000, contre 250.000 en 2014.
Proportion relativement faible en France
Dans cette enquête, la première de cette ampleur depuis le projet Clandestino de la Commission européenne en 2008, Pew Research note que la population illégale en France représente une proportion relativement faible de la population totale, environ 0,6 %, car les illégaux sont souvent régularisés après quelques années de résidence. Ce qui explique que le nombre total d'illégaux y soit identique à celui estimé en 1998 par une mission du Sénat .
L'Asie premier pourvoyeur de clandestins
L'enquête, réalisée à partir des données sur la période 2014-2017 obtenues auprès des administrations des 32 pays d'Europe occidentale, montre une hausse de 1 million du nombre d'immigrés illégaux depuis 2014, mais un déclin de 300.000 par rapport au record de 2016. Des données à considérer puisqu'elles essayent, par diverses méthodes de recoupement, notamment médicales, de cerner un phénomène clandestin. Le rapport dénombre les non ressortissants de l'Union européenne ou de l'EFTA (Norvège, Suisse, Liechtenstein, Islande) y résidant sans titre de séjour valable. Il additionne des illégaux stricto sensu et des demandeurs d'asile dans l'attente d'une validation de leur dossier, au motif que ces derniers sont généralement entrés en Europe clandestinement et verront, dans 80 % des cas, leur demande rejetée. Ces demandeurs d'asile représentent un quart du total de l'immigration illégale. Les demandeurs d'asile dans les limbes judiciaires sont peu nombreux en France et au Royaume-Uni, de l'ordre de 30.000, contre plus de 400.000 en Allemagne.
Les illégaux, dont la majorité sont résidents depuis moins de cinq ans et dont les deux tiers ont moins de trente-cinq ans, sont de sexe masculin à 54 %. Un tiers provient d'Asie, surtout d'Afghanistan et du Pakistan, un quart des Balkans, de Russie ou de Turquie, un cinquième du Moyen-Orient, principalement de Syrie et d'Irak, et 17 % d'Afrique subsaharienne, puis 8 % d'Amérique latine.
Yves Bourdillon